Wolfgang Pauli était un physicien autrichien qui apporta une contribution majeure à l’élaboration de la mécanique quantique.

Il introduisit en 1924 le concept de spin, expliquant au passage la structure des spectres atomiques et formula le principe d’exclusion pour lequel il reçut le prix Nobel en 1945. C’est lui qui supposa en premier l’existence du neutrino afin de permettre la conservation de l’énergie dans les désintégrations bêta. Enfin, c’est à lui qu’on doit la preuve du théorème CPT décrivant la manière dont se comportent les symétries de charge, de parité et de temps.

Son ami Werner Heisenberg, dont la contribution à la science fut tout aussi géniale, écrivit un texte décrivant les conceptions philosophiques de l’intéressé. Nous vous en proposons un résumé.

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Pauli et Heisenberg

Les images préexistantes

Pauli était vu par ses contemporains comme un physicien brillant, perfectionniste et aux travaux aussi rigoureux qu’influents. Derrière cet esprit apparemment critique et scientifique se cache néanmoins un profond intérêt philosophique pour tout ce qui a trait aux régions obscures de la réalité et aux considérations de l’âme humaine les plus éloignées qui soient de l’approche rationnelle.

Fasciné par la théorie de la connaissance, il mettait en avant le rôle de l’intuition et ne se satisfaisait pas d’une vision purement empirique selon laquelle on ne pourrait établir de lois naturelles qu’à partir d’un matériau expérimental. Il cherchait à mettre en relation les perceptions sensorielles et les concepts théoriques et ne s’arrêtait pas à l’approche purement logique pour établir cette liaison.

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Les deux mêmes quelques années plus tard

Pour lui, le lien entre les expériences et les idées se situe dans certaines images originelles qui préexistent dans l’âme. Ces images ne se situeraient pas dans la conscience et ne seraient pas liées à des idées formulées rationnellement. Le bonheur lié à l’acquisition d’une connaissance nouvelle prendrait alors sa source dans ces images préexistantes.

Pour Pauli, cette vision platonicienne de la nature permet d’expliquer la fondation de la science moderne. Il prend pour exemple Kepler qui selon lui, s’est convaincu de l’exactitude du modèle copernicien davantage grâce à sa correspondance avec des concepts religieux comme la Trinité que par son adéquation au matériau expérimental.

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Johannes Kepler

Le matériel et le spirituel

Dans la pensée scientifique, qui est dans une certaine mesure caractéristique de l’Occident, l’âme se tourne vers les objets extérieurs et cherche la raison de la fragmentation du monde. La mystique cherche au contraire, en Orient comme en Occident, à expérimenter l’unicité du monde, en considérant la multiplicité comme une illusion. Ces deux positions dialectiques cohabiteront toujours dans l’âme humaine.

Alors qu’au printemps 1927, Bohr énonce son principe de complémentarité, Pauli fut l’un des premiers à le soutenir sans réserve. Selon ce principe, nous avons le choix, dans toute expérience, de déterminer quel aspect nous voulons faire ressortir : corpusculaire ou ondulatoire pour la lumière par exemple. Cela implique un sacrifice dans la mesure où nous devons renoncer aux autres aspects.

Pauli retrouve alors ce qui avait retenu son attention dans la philosophie alchimique : la tentative de traduire dans un même langage, les processus matériels et l’ambiguïté spirituelle. Entraîné sur ce terrain par le psychologue Carl Jung, il tentera alors de recréer un tel langage en ce qui concerne la physique atomique et la psychologie moderne.

La raison et la mystique

Pauli s’est enthousiasmé dans la théorie des particules élémentaires pour les différentes symétries quaternaires qu’il rapprochera de la Tetractys des pythagoriciens.

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La Tetractys

Il se tient en revanche éloigné des systèmes philosophiques issus de la division cartésienne et critique l’utilisation kantienne du concept d’a priori affirmant que la raison ne pas tout expliquer. Contrairement à Platon, Pauli considère que l’âme humaine a une influence sur le monde des idées. Cela l’amène à rejeter la conception darwinienne et à considérer que l’évolution des espèces ne peut s’expliquer ni par les structures causales ni par le concept de hasard.

Pauli cherchera ainsi toute sa vie à affronter et à dépasser les oppositions entre les pensées rationnelles et mystiques.

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