Alors que la sonde Juno arrive à proximité de Jupiter, un phénomène qui a permis d’économiser du carburant est souvent évoqué. Il s’agit de l’assistance gravitationnelle. Voyons de quoi il en retourne.

La sonde Juno devant Jupiter.
La sonde Juno devant Jupiter.

Afin de parcourir la distance astronomique entre la Terre et Jupiter (le trajet total aller est de près de 3 milliards de kilomètres), la sonde a besoin d’une quantité importante de carburant qu’elle utilise pour se propulser mais surtout pour modifier sa trajectoire.

Une astuce est alors utilisée par les scientifiques chargés du projet : faire en sorte que la sonde frôle une planète pour être projetée à la manière d’une fronde et économiser ainsi une énorme quantité de carburant.

Lancement de Juno.
Lancement de Juno.

Et la planète que Juno a frôlé pour se projeter n’est autre que … la Terre ! En effet, une fois la sonde lancée dans l’espace, elle s’est retrouvée en orbite autour de la Terre et une propulsion intense à un endroit précis de cette orbite a entrainé la sonde sur une trajectoire l’amenant quelques mois plus tard à raser notre planète à seulement 800 km d’altitude.

assistance gravitationnelle
Trajectoire de Juno (crédit NASA/agences-spatiales.fr)

Sur le schéma ci-dessus, le Soleil est en jaune, la trajectoire de la Terre en bleu et celle de Jupiter en orange. L’orbite initiale de Juno est représentée par l’ellipse blanche sur laquelle la correction de trajectoire a été effectuée entre le 28 et le 30 septembre 2012. Le 9 octobre 2013, la sonde rase la Terre ce qui modifie considérablement sa trajectoire en l’envoyant sur une plus grande ellipse en direction de Jupiter.

Que s’est-il passé le 9 octobre 2013? Comment la sonde a-t-elle pu gagner de l’énergie et de la vitesse au beau milieu de l’espace?

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Simplifions tout d’abord le problème. Lorsque la sonde se rapproche de la Terre, elle entre dans ce qu’on appelle la sphère de Hill de la planète. Dans cette sphère, on peut considérer que la sonde ne subit que l’attraction de la planète : l’attraction du Soleil est en effet négligeable tant que la sonde reste à quelques milliers de kilomètres de la Terre.

Le système étudié ne comporte alors plus que deux corps : la Terre et la sonde. Dans ce système, la norme (la valeur affichée au compteur) de la vitesse de Juno par rapport à la Terre est constante. Seule la direction de la vitesse est modifiée.

Assistance gravitationnelle
Modification de la direction de la vitesse. La taille de la flèche est proportionnelle à la valeur (la norme) de la vitesse. (En pratique, les vitesses initiales et finales sont les mêmes mais la vitesse peut varier pendant l’interaction)

On peut voir ce genre d’interaction entre la sonde et la Terre comme une collision élastique c’est-à-dire sans perte ni gain d’énergie, un peu à la manière d’une balle de tennis qui rebondit sur une raquette immobile. La balle arrive vers la droite à 60 km/h et repart vers la gauche à 60 km/h. La norme de la vitesse de la balle est constante, seule la direction a changé.

Mais, et c’est le point central de l’analyse, la Terre possède une vitesse par rapport au Soleil. Donc la vitesse de la sonde par rapport au Soleil s’obtient en ajoutant la vitesse de la sonde par rapport à la Terre à la vitesse de la Terre par rapport au Soleil.

Sur le schéma suivant, cette opération est représentée en mettant bout-à-bout les flèches représentant la vitesse de la sonde par rapport à la Terre (en rouge) et la vitesse de la Terre par rapport au Soleil (en bleu).

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Composition des vitesses.

Le résultat donne la vitesse de la sonde par rapport au Soleil (en noir). On constate que les deux flèches rouges sont de même taille mais que la flèche noire du bas est beaucoup plus grande que celle du haut. Par rapport à la Terre, la sonde garde la même vitesse mais par rapport au Soleil, la sonde accélère.

Reprenons l’analogie avec la balle de tennis. La balle arrive toujours à 60 km/h vers la droite par rapport au sol mais cette fois-ci la raquette se déplace à 40 km/h vers la gauche. La raquette « voit » donc la balle arriver sur elle à 100 km/h. Le rebond est élastique, la balle rebondit vers la gauche en gardant la même vitesse par rapport à la raquette : la raquette « voit » donc maintenant la balle s’éloigner d’elle à 100 km/h.

tennis ball and raquet in action

Or la raquette n’a pas été affectée par le choc (car elle est plus lourde que la balle et maintenue par le joueur) donc elle continue à aller à 40 km/h vers la gauche. La balle a donc désormais une vitesse de 140 km/h par rapport au sol.

Bien sûr, si la raquette va à 40 km/h mais cette fois vers la droite, on réalise un magnifique amorti. Le phénomène est d’ailleurs également utilisé pour ralentir les sondes avec l’assistance d’une planète.

L’assistance gravitationnelle permet ainsi de projeter et de ralentir des sondes le tout sans dépenser le moindre carburant !

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